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Intelligence Artificielle : définitions, procédés, enjeux juridiques et socio-politiques

L’intelligence artificielle (IA) est considérée par les entreprises, les chercheurs, les banques et les pouvoirs publics comme le défi majeur du XXIe siècle. C’est un domaine qui ne cesse de se développer et se perfectionner, l’occasion de découvrir les principaux éléments qui la définissent et les enjeux qui en émanent.

Sommaire :

1.             Définitions

2.             Histoire de l’intelligence artificielle

3.             Les procédés de l’intelligence artificielle

4.             Le potentiel économique de l’intelligence artificielle

5.             Les défis juridiques de l’intelligence artificielle

6.             Les enjeux socio-politiques de l’intelligence artificielle

Définitions de l’intelligence artificielle

L’intelligence artificielle (artificial intelligence en anglais) est un concept complexe et difficile à définir. Yann LeCun, pionnier dans le domaine et chercheur en IA chez Facebook définit l’intelligence artificielle comme un « ensemble de techniques permettant à des machines d’accomplir des tâches et de résoudre des problèmes normalement réservés aux humains et à certains animaux ».

En d’autres termes, la recherche sur l’IA consiste à recréer au sein de programmes informatiques les fonctionnalités techniques du cerveau humain. La définition de l’IA est presque impossible à poser à cause de la notion même d’ « intelligence ».

Jusqu’à présent, la technologie reproduit essentiellement des capacités rationnelles humaines. L’état de la recherche actuelle ne permet pas encore de créer des machines capables d’imiter l’intuition humaine, l’empathie ou le sens des responsabilités qui jouent un rôle essentiel dans la vie des humains.

Dès lors, la définition de l’IA est évolutive. Son évolution est influencée par les méthodes et procédés développés au fur et à mesure de l’avancé des progrès techniques.

Histoire de l’intelligence artificielle

L’Histoire de l’intelligence artificielle est marquée par des évènements mettant en confrontation les humains avec des ordinateurs. La confrontation permet de jauger l’évolution qualitative des programmes informatiques.

En 1950, le mathématicien britannique Allan Turing publie l’article « Computing Machinery and Intelligence ». Il explore l’idée de la capacité d’une machine à imiter et tenir une conversation humaine.

Le « test de Turing » fait communiquer à l’aveugle une personne A avec une personne B puis avec une machine programmée. L’intelligence de la machine est mesurée en fonction de la capacité du sujet à faire la distinction entre les deux interactions.

En 1956, l’expression d’« intelligence artificielle » est attribuée par des universitaires et informaticiens au cours de la conférence du Dartmouth College aux Etats-Unis.

A partir de la fin des années 1990, on trouve un renouveau de l’IA qui s’articule autour de deux facteurs : la collection massive de données et l’amélioration des systèmes de calculs des algorithmes. En 1997, l’ordinateur Deep Blue bat le champion d’échecs Garry Kasparov.

En 2011, l’ordinateur Watson d’IBM devient champion du jeu télévisé américain Jeopardy. En 2016, le programme AlphaGo, développé par Google DeepMind, bat le Lee Sedol, meilleur joueur du monde au jeu de Go. Le programma AlphaGo finira par se battre lui-même. Cela atteste de la puissance de calcul décuplée de la machine.

 Procédés de l’intelligence artificielle

L’essence de l’IA réside dans l’accomplissement de tâches « humaines » par des machines. Depuis l’avènement d’internet, on associe presque toujours l’IA aux capacités d’apprentissage des machines. Dès lors, la plupart des programmes informatiques promeuvent des méthodes centrées sur l’apprentissage.

La méthode de l’apprentissage automatique (« machine learning » en anglais) est un système dans lequel le programme informatique apprend des règles prédéterminées pour ensuite définir son propre système. Il est apparu dans les années 1980.

La méthode de l’apprentissage profond (« deep learning » en anglais) repose sur un système dont l’architecture imite le réseaux de neurones artificiels de l’humain. Yann LeCun (interviewé par le journal Le Monde) souligne que “La technologie du deep learning apprend à représenter le monde c’est-à-dire, comment la machine va représenter la parole ou l’image par exemple.

Avant, il fallait le faire à la main, expliquer à l’outil comment transformer une image afin de la classifier. Avec le deep learning, la machine apprend à le faire elle-même”. Le système peut alors apprendre de lui-même sans intervention humaine.

C’est une méthode utilisée par les entreprises d’Internet pour la reconnaissance d’image, la traduction automatique, les chatbots, la modération automatique des réseaux sociaux ou encore les recommandations personnalisées.

Le potentiel économique de l’intelligence artificielle

Selon l’étude « The business of AI startups » de James E. Bessen, les startups des secteurs financier, du commerce en détail et des médias sont celles qui reçoivent la majeure partie des investissements dédiés à l’IA.

Selon l’étude « What’s the real value of AI for your business and how can you capitalise? » réalisé en 2019 par PwC, la technologie pourrait rapporter plus de 15 000 milliards de dollars à l’économie mondiale d’ici 2030. De plus, l’IA contribuerait à une hausse de 9 000 milliards de dollars du PIB mondial d’ici 2030.

En juillet 2019, le ministre de l’économie Bruno Lemaire a dévoilé un plan d’investissement de 1,5 milliards d’euros dédié à l’IA jusqu’en 2022. Ce plan aurait pour ambition de doper l’attractivité des starts up françaises et de l’environnement économique français.

Les défis juridiques de l’intelligence artificielle

•    Droits des obligations civiles et IA

Le droit de la responsabilité est l’obligation de réparer un préjudice, même involontaire, provoqué par une personne et subi par une autre (la victime). L’IA soulève la question de la responsabilité des machines ou programmes informatiques en cas de dommage provoqué.

Selon la norme ISO 8373 :2012, le robot peut être défini comme « un mécanisme programmable actionné sur au moins deux axes avec un degré d’autonomie, se déplaçant dans son environnement, pour exécuter les tâches prévues ».

Contrairement aux humains, les machines ne sont pas dotées de personnalité juridique. Par conséquent, elles ne peuvent être responsables de leurs actes. Il faut alors envisager la question de la responsabilité des fabricants de machines ou des concepteurs de programmes informatiques.

Or, ni le législateur français et ni le législateur européen ne se sont intéressés à la création d’un régime de responsabilité pour les produits robotiques comme c’est le cas pour les produits pharmaceutiques par exemple. Il faut alors se référer au droit commun de la responsabilité civile.

Des juristes et chercheurs défendent tout même l’idée de la création d’un

« Droit des robots » combinant ensemble droit des biens et droit des personnes afin de faire émerger une nouvelle personnalité juridique.

•    Propriété Intellectuelle et IA

La propriété intellectuelle protège les œuvres de l’esprit et permet aux créateurs de tirer une reconnaissance ou un avantage financier de leurs inventions ou créations. Elle octroie un monopole exclusif d’exploitation.

Les logiciels paramètrent le fonctionnement de l’IA. Ils sont protégés par un droit d’auteur spécial reconnu au niveau national (cf. loi Lang de 1985), au niveau européen (cf. Directive de 1991) et international (cf. Wipo Copyright Treaty de 1996).

Cependant, cette protection est restrictive. Par exemple, un logiciel ne peut être protégé que lorsqu’il est intégré dans un code source et lorsque son caractère original est prouvé. La fonctionnalité en elle-même du logiciel n’est pas protégée car la fonctionnalité reste au stade de l’idée.

Or, la propriété intellectuelle ne protège pas les idées. Ce droit d’auteur est réduit   et atrophié par rapport aux œuvres de droit commun. Le droit de respect de l’intégrité de l’œuvre est d’ailleurs réduit puisqu’on reconnaît l’exception de décompilation c’est-à-dire, la possibilité   de déconstruire un logiciel pour le reconstruire en le rendant compatible avec d’autres logiciels.

Quant aux algorithmes, leur protection n’est pas directement admise par la propriété intellectuelle. Ils peuvent toutefois bénéficier d’une protection indirecte par le biais de la protection du logiciel   par le droit d’auteur si cet algorithme est intégré dans un code source par exemples.

Enfin, l’IA actuelle est centrée sur l’apprentissage des machines à partir de bases de données. Pour les bases de données, le législateur français a mis en place le droit sui generis des producteurs de bases de données aux articles L341-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Les producteurs protégés sont ceux qui « attestent d’un investissement financier, matériel ou humain substantiel » effectué lors de la conception et constitution des bases de données.

Ce droit permet une protection quasi perpétuelle de la base à partir du moment où le producteur justifie de nouveaux investissements substantiels. L’appréciation de ce critère prend  en compte les coûts générés par la collecte, l’objectif des investissements et le traitement des informations réunies.

•    Droit au respect de la vie privée et IA

Les algorithmes de l’IA sont capables de traiter rapidement des quantités massives de données croissantes. La guerre de la collecte et au traitement des données mène souvent à la violation du droit au respect de la vie privée des utilisateurs.

Dès leur adoption, les lois sur la protection des données personnelles ont été conçues pour protéger le respect de la vie privée des individus. Le Règlement général sur la protection des données (dit RGPD), entré en vigueur le 25 mai 2018, encadre le traitement d’informations relevant de la vie privée des personnes physiques. La collecte et le traitement de ces données doivent suivre un principe de transparence.

Les enjeux socio-politiques de l’IA

L’usage de l’IA s’étend et s’intensifie dans tous les domaines. Cela créée de nombreuses frictions aussi bien politique, démocratique que géopolitique.

Dans le domaine social, l’automatisation du travail est favorisée par l’IA. Selon une étude de l’Institut Sapiens, 2,1 millions d’actifs ont « une forte probabilité de voir leur emploi disparaître dans les prochaines années ». De nouveaux métiers sont apparus comme celui du Data Scientist.

Au niveau politique, l’IA contribue au renforcement de la sécurité et de la défense. Cependant, ce renforcement favorise également le contrôle social de la part des pouvoirs publics. Par exemple, depuis 2009, la Chine développe le projet Social Credit System, un système de notation comportementale et de réputation des citoyens. Les citoyens se voient attribuer des notes en fonction de leur statut économique et social.

Enfin, le potentiel du marché économique met l’IA au centre de certaines considérations géopolitiques. L’intelligence artificielle est même au cœur de la rivalité commerciale et géopolitique entre les Etats-Unis et la Chine.

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